Journal intime de Sophia – Episode 2

Voilà on y est, une odeur d’acidité de plus en plus prononcé se répand dans le cockpit, un mélange d’excitation, d’angoisse et d’adrénaline qui se répand à travers nous, on ne peut mentir avec les odeurs, pas de faux semblant, un mélange subtil qui reflète nos véritables états d’esprit, ce mélange de parfums annonce qu’il est temps de passer à l’action. Notre Capitaine se lève sans un mot, traverse  le poste de commandement, puis on entend ses pas dans la coursive, le voilà qui descend dans la soute, quelques secondes plus tard, un léger mouvement du vaisseau nous apprend qu’il vient d’atteindre le sas et à rejoint son armure, nous connaissons le travail de chacun, Tank se positionne le plus près possible de la position d’où émet le signal, Kassandra et moi sommes aux aguets au sonscan, nous ne sommes pas seuls dans cette crevasse, non loin notre requin rode, mais ne focalise en rien notre attention, un énorme bâtiment vient de se positionner au-dessus de nous, un bâtiment militaire de l’Union, un autres signal gigantesque apparait au fond de la faille, nous restons en mode passif afin de rester invisible pour ses titans.

Pendant ce temps-là, Akiléus avance silencieusement dans un dédale de bétons, la rustine de colle fondue sur le câble com semble tenir bon, on reçoit le sifflement de sa respiration et quelques images entrecoupées de sa caméra. Au fond du trou une armure noire git contre la paroi, une magnifique armure noire avec des lignes parfaites, un modèle fascinant, surement du matos militaire, voire même expérimental, tellement elle semble en avance sur notre équipement.

A cet instant tout s’enchaine comme une suite d’événements catastrophiques d’une mauvaise série Thex comme on les appelle, de celles qui nous font marrer quand il nous les raconte.

Thex est notre poivrot haut en couleur de l’unique bar de notre station, on adore l’allumer avec quelques verres pour passer une bonne soirée en écoutant ses histoires. Pour une tournée il vous parle des monstres géants qu’il a vaincus, mais si on alimente suffisamment l’animal, il nous racontera qu’une femme l’attend avec ses trois enfants naturels !!! surement un ancien soldat qui a du muter à cause des radiations lors d’une mission en surface, pour preuve ses cheveux sont couleur rouille, et ne semble jamais vieillir, c’est bien la preuve !! mais comme il est calme même rempli d’alcool on l’autorise à rester au bar.

Les évènements s’enchainent : l’attaque de deux murènes, un chasseur apparait, un virus informatique incontrôlable, un monstre colossal surgit des abysses, une torpille explose, l’effondrement d’une falaise avec nous dessous.

Aussi incroyable que ça puisse paraitre, oui journal on s’en est sorti, grâce à notre talent et je suppose surtout avec beaucoup de chance.

Je reste estomaquée par les cojones de notre capitaine, en solo dans le noir avec une armure à moitié virussée, il a réussi à sortir cette armure noire de ce labyrinthe, malgré deux murènes géantes à ses trousses. Pour finir il a ouvert son sonscan actif à fond pour être localisable, et à quelques secondes près une pluie de torpilles se serait abattue sur lui.

Il fut accueilli à bord comme un miraculé, comme notre héros, mais ses sourires et tapes sur nos épaules sonnaient faux, trop exagérés, son regard m’apprit qu’il n’en était pas à son premier rodéo musclé, qu’il en avait déjà que trop vécus. C’est à cette instant que je compris, il n’était pas reconnaissant envers sa bonne étoile, ni heureux d’être toujours en vie, les sourires, les tapes étaient sincères mais nous étaient destinées, il était heureux que son équipage ait survécu, heureux de ne pas revivre ses enfers passés.

Après cette invraisemblable aventure, les quelques jours nécessaires pour rejoindre Gelius furent surchargés de boulot, enfin surtout pour moi !!! « Bouge-toi, les chiottes débordent, c’est primordial de les faire fonctionner », « Sophia tu n’as toujours pas réparé mon armure, c’est crucial fillette »,  « Comment ça y a encore le virus dedans mais moi j’ai trop hâte de botter des culs avec cette armure noire, et en plus tu as toujours pas coupé la tête dedans !!! » Tu dois, il faut, bouge-toi, marre marre marre, j’ai pas eu 10 minutes de repos, trois jours de boulot non-stop, pire que quand je rentre d’expédition après plusieurs semaines d’absence, y a une montagne de boulot en retard chez Repartout que je suis la seule à pouvoir faire, mais eux au moins ils me laissent mon quart de sommeil.

Durant ces trois jours de dingue, j’ai remis de l’ordre dans le vaisseau, j’ai réussi à déverrouiller l’armure noire et j’ai trouvé une vidéo mystérieuse à l’intérieur, elle parle d’un certain Sulivan à retrouver dans un bar sur Oméros, il aurait volé des données primordiales pour l’union, forcement l’équipe se dit que ce truc qui pue l’espionnage, le danger, la mort, il faut aller le récupérer !! Tu m’étonnes qu’on ne vive pas vieux nous les indépendants. En plus comme Oméros est notre capitale militaire, Kassandra est chaude bouillante pour y aller dégoter son interface neurale, un matos militaire de haute technologie quasi introuvable mais indispensable pour faire fonctionner l’armure noire.

 Mais en attendant, et vu notre autonomie ridicule, on doit passer se ravitailler à Gelius, comme de coutume nous faisons une pause au seul bar potable de la station, on y apprend les dernières nouvelles. Cette fois on y parle d‘une baleine de 300 mètres ou 300 kilomètres de long, je me rappelle plus, mais je suppose que d’ici quelques temps elle aura encore grossi, suivant l’avancé de la cirrhose du capitaine pirate émérite dont nous tirons cette histoire. On nous signale les dernières tensions dans divers endroits du globe, nous au sein de l’Union de la Méditerranée nous n’avons aucune inquiétude d’attaque pirate massive, ni de conflit majeur entre nation, le Détroit de Gibraltar est notre rempart et Omeros nous protège de tous ces dangers extérieurs.

Je laisse mon équipe se détendre pour rejoindre le mini souk de la station. La plupart des gens n’y voient que tables et comptoirs misérables remplis de fatras de seconde main, c’est vrai. Mais pour qui sait chercher, il est possible d’y trouver des perles au meilleur prix, car bon nombre de ses marchands ne peuvent voyager, et la plupart de leurs clients sont des néophytes ou des touristes avides d’exotisme et ils ne peuvent donc vendre leurs trésors à leur vrai prix.

Je finis par trouver un virus d’attaque de qualité suffisante pour contrecarrer le virus de l’armure, je le troc contre ce virus et il est temps de quitter la station au plus vite avant qu’il contamine le secteur.

A mon retour je découvre qu’une passagère « clandestine » embarque avec nous, elle paie bien, 4 000 sols, elle est belle, maniérée, les mains fines et délicates de celle qui ne s’en serve que pour lever des cocktails à leurs lèvres. On ne lui pose aucune question, ses frais d’embarquement prouvent qu’elle sera discrète. Assurément.

Oméros, ville rempart de l’Union, notre bastion militaire, sa taille et sa splendeur nous rappelle rapidement que nous ne sommes qu’un équipage d’une colonie secondaire dans un vaisseau ridicule. Nous accostons dans un hangar immense, plus grand que notre station, je cherche du regards un vaisseau qui pourrait être plus petit que le notre. Nous sommes des nains dans un monde de géants, je m’inquiète pour Staky et son équipage, ils sont peut-être au fond de la faille ou pire. Et si l’Union les a attrapés, interrogés et s’ils parlent, les militaires peuvent décider d’aller « effacer » la population de Eronne aussi facilement que lorsque l’on nettoie nos cercueils pour accueillir de nouveaux occupants.

Akiléus me bassine encore avec son armure à réparer, Kassandra revient à la charge avec sa fichue armure noire, qu’elle doit mettre, elle assure que c’est son destin, le truc le plus important pour elle.

Ma pauvre Kassandra, elle est si sincère, ses yeux semblent si vivants quand elle parle de l’armure, tellement plus scintillants que quand elle parle de son mari qui l’attend. Comment lui annoncer qu’elle ne pourra jamais la porter, comment lui expliquer qu’une armure militaire dernière génération est si reconnaissable, si peut discrète, même si je parvenais à la camoufler visuellement sous des morceaux de plaques rouillées, ses signatures ne laisserait aucun doute, de plus j’ai désactivé le GPS mais il y a toutes les autres sécurités que je ne connais pas : reconnaissance faciale, controle rétinien, mot de passe, mise en phase du rythme cardiaque du porteur autorisé dont le simple but est d’empêcher qu’elle ne tombe dans les mains d’ennemis de la nations ou de pirates, des groupes bien plus compétents que moi, il y a tellement de systèmes et sous-systèmes dedans que c’est à croire que plus on en met dedans plus il y a de place. Et même si je vaincs toutes ses protections, on va forcément attirer l’attention quand elle va ouvrir le feu avec son rayon à neutron ou une autres armes dernier cri. Des pouilleux des abîmes comme nous ne disposent pas d’arme de cette nature. La vérité journal c’est que j’ai eu du bol pour déverrouiller l’armure et son virus, et je cauchemarde que Kassandra finisse le cerveau grillé par une défense de l’armure. Tout ceci est bien trop gros et dangereux pour nous.

Toutes ses pensées se bousculent dans ma tête, je ne réalise pas que l’équipage m’a trainée dans un bar, surement pour le pot d’adieu de notre passagère. Kassandra et moi décidons de les quitter afin de donner du courrier et trouver le matos que recherche Nocturne et la station : une batterie et un filtre à air. On finit par les trouver mais les sommes colossales de 30K et 60K sols respectivement demandées prouvent que la station tombe en miette et ne tiendra plus bien longtemps. Ce n’est pas la soute remplie de bric-à-brac qui réglera la facture, on laisse tomber pour l’instant.

Kassandra revient à la charge au sujet de ses implants neuronaux, elle pense pouvoir en trouver dans les niveaux inférieurs, le coin des mutants, je rejoins vite le reste de l’équipe avant qu’elle m’entraine dans ce coupe gorge.

Ils sont dans un autre bar en train d’enquêter sur Sulivan, cela nous entraine dans l’hôtel d’à côté ou j’essaie de pirater sans succès la base de données des cercueils, l’autre, la nouvelle qui s’incruste est toujours des nôtres mais semble avoirs des aptitudes particulières, elle met deux hommes à ses pieds en quelques secondes, elle pourrait être utile finalement.

Je décide d’aller me reposer dans le vaisseau, pendant que le reste du groupe part vendre le manganèse. A leur retour, leur sourire signale qu’ils ont empoché un parquet de thune, mais leur odeur !!! Ses relents de cigare mélangés à celle de putes pas fraiches sont une horreur !!